Paris 1er

CONSTRUCTION – Limites à l’application des clauses de conciliation préalable


 

Cass.civ.3, 16 mars 2022, 21-11.951

 

 

Les marchés de travaux peuvent prévoir des clauses dites de conciliation préalable selon lesquelles les parties devront, dans l'hypothèse où un litige surviendrait, saisir un organisme tiers avant toute procédure judiciaire.

C’est par exemple le cas lorsqu’un maître d’ouvrage et un maître d’œuvre conviennent de ce qu’ils seront tenus de saisir l’ordre des architecte avant d’engager toute action judiciaire.  

La validité de ces clauses qui permettent notamment de faire échec à l’action du maître d’ouvrage bien des années après la saisine d’une juridiction, est admise depuis longtemps par la jurisprudence.

 

L'application de ces clauses trouve néanmoins plusieurs limites.

Tout d’abord, cette clause ne s’applique pas à la demande d’expertise judiciaire. En effet, le défendeur attrait à une expertise in futurum ne peut demander sa mise hors de cause en soutenant que la clause de conciliation préalable n’a pas été respectée à la date où le Juge des référés statue.

Ensuite, dans le même ordre d’idée, il est toujours possible au demandeur de régulariser cette situation en saisissant l’organisme tiers au cours de la procédure – à condition bien sûr qu’il le fasse dans le délai de prescription.

Par ailleurs, cette clause ne saurait s’appliquer en matière de responsabilité civile décennale et en matière de responsabilité civile délictuelle.

Enfin, cette clause de conciliation ne s’applique pas à la demande reconventionnelle du locateur d’ouvrage comme c’est par exemple le cas en matière de paiement d’honoraires. C’est ce que rappelle la décision de la Cour de cassation rendue le 16 mars 2022 au visa des anciennes dispositions de l’article 1134 sur la force obligatoire des conventions :

« 7. Pour rejeter la demande reconventionnelle en paiement d'honoraires de l'architecte, l'arrêt retient que l'article G 10 du cahier des clauses générales du contrat d'architecte stipule qu'en cas de litige portant sur le respect des clauses du contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes, avant toute procédure judiciaire sauf conservatoire, que cette clause ne fait aucune distinction entre une demande avant toute procédure judiciaire et une demande reconventionnelle et que c'est par une exacte analyse des faits de la cause que le premier juge a déclaré irrecevable cette demande en paiement d'un solde d'honoraires faute de saisine préalable du conseil régional de l'ordre des architectes.

8. En statuant ainsi, alors que la clause imposant la saisine du conseil régional de l'ordre des architectes « avant toute procédure judiciaire » ne s'applique pas à une demande reconventionnelle formée en cours d'instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».

 

 

Voir également :

En matière de troubles anormaux du voisinage : https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/immobilier-extension-de-l-obligation-d-un-prealable-amiable-en-matiere-de-troubles-anormaux-du-voisinage

Sur les honoraires de l'architecte : https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/construction-la-faute-de-l-architecte-implique-t-elle-un-remboursement-de-ses-honoraires
 


 

 

 

 


Articles similaires

Derniers articles

ASSURANCES - Limites de l'action directe de la victime et qualification de la clause délimitant l'étendue temporelle de la garantie en condition de la garantie

CONSTRUCTION - Désordre affectant un revêtement de sol et garantie décennale (non)

VEFA - Forclusion annale de l'action en garantie de non-conformité

PRESCRIPTION - Sur le délai de l'action fondée sur l'article 1792-4-3 du code civil (rappel)

PREUVE - Sur la recevabilité des rapports d'expertise privée

CONSTRUCTION – Sur la responsabilité du maître d’œuvre en cas de défaut de contenance : l’architecte supporte une obligation de contrôle étendu

CONSTRUCTION – Sur les conditions de la réception judiciaire et de la réception tacite

VENTE IMMOBILIERE – De la responsabilité du vendeur réputé constructeur au titre des articles 1792 et suivants du code civil

CONSTRUCTION – Assurance dommages ouvrage

PROCEDURE CIVILE - Vérification du commissaire de justice et régularité de forme

CONSTRUCTION – Immixtion et prise délibérée de risque par le maître d’ouvrage lors du chantier

PROCCEDURE CIVILE - La mention du nom du destinataire d'un acte suffit-elle à établir la réalité du domicile ?