CONSTRUCTION – L’absence de réalisation d’une étude de sols par le maître d’ouvrage est-il une cause exonératoire de responsabilité des constructeurs en cas de survenance d’un dommage de type décennal ?
Cass.civ.3, 7 novembre 2024, 22-22793
Dans cette affaire, des désordres de nature décennale liés à l’inadéquation des fondations par rapport aux caractéristiques du sol, étaient apparus alors que le maître d’ouvrage avait délibérément choisi de ne pas réaliser d’étude de sols.
La question se posait de savoir si la responsabilité des constructeurs pouvait, comme le maître d’ouvrage ne manquait pas de le soutenir, être engagée sur le fondement des dispositions de l’article 1792 du code civil, malgré l’absence d’étude de sols.
Au visa de l’article 1792 du de code civil, la Cour de cassation retient :
« 29. Aux termes de ce texte, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
30. Constitue la cause étrangère, au sens de ce texte, l'acceptation délibérée du risque par le maître de l'ouvrage, qui exonère en tout ou partie les constructeurs de leur responsabilité tant à son égard qu'à l'égard de l'acquéreur.
31. Pour condamner les sociétés Axa et Alpha Insurance à indemniser les acquéreurs sur le fondement de la responsabilité décennale, l'arrêt retient que les intervenants à la construction de la villa et du mur de soutènement ne démontrent pas que les désordres avérés, de nature décennale, ont été provoqués par une cause étrangère.
32. En statuant ainsi, après avoir retenu que le maître de l'ouvrage avait pris le risque délibéré de ne pas faire réaliser d'étude de sol avant la réalisation des travaux malgré l'avis défavorable du contrôleur technique et que sa faute justifiait que son assureur, la société Lloyd's Insurance Company, ne soit garantie par les sociétés Axa et Alpha Insurance qu'à hauteur de la moitié des dommages, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ».