Paris 1er

IMMOBILIER – Une action concernant un empiètement n’est pas nécessairement une action réelle


IMMOBILIER – Une action concernant un empiètement n’est pas nécessairement une action réelle


Cass. civ. 3, 8 février 2023, n° 21-20535

 

 

Dans cette affaire, une SCI avait donné à bail emphytéotique un terrain à une société, pour qu'y soit édifiée et exploitée une clinique de rhumatologie. Le bail emphytéotique avait par la suite été transformé en bail et contrat de concession d'eau. La clinique s'étant vu retirer son forfait « boues et eaux thermales » par l'Assurance maladie, elle avait changé d'activité, devenant un centre de rééducation. Le bailleur jugeant qu'elle avait manqué aux obligations de ce bail, assignait la clinique en résiliation, lui reprochant notamment un empiètement.

Le preneur lui opposa une fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action.

 

La troisième chambre civile retient que l'action tendant à obtenir la démolition de ce qui a été construit en empiétant sur le fonds voisin est une action réelle soumise à la prescription de trente (30) ans (Cass. civ. 3, 6 avril 2022, n° 21-13891 ; Cass. civ. 3, 11 février 2015, 13-26.023 ; Cass. civ. 3, 20 novembre 2002, 00-17.539).


Ce cas d’espèce est cependant différent.

En effet, notre bailleur ne sollicitait pas la démolition de ce qui avait été fait en empiétant sur son fonds. Il invoquait l'empiètement en tant que violation des obligations prévues au contrat sur le fondement des dispositions de l’article 1231-1 du code civil.

Or, l'action en responsabilité contractuelle est, conformément aux dispositions de l’article 2224 du code précité, une action personnelle soumise à la prescription de cinq (5) ans.

La décision de la troisième chambre civile n’est donc pas surprenante puisque cette affaire ne concernait pas l’action réelle d’un propriétaire souhaitant mettre fin à un empiètement mais à une partie à un contrat souhaitant engager la responsabilité contractuelle.

 

Cette décision est à rapprocher d’une autre affaire, dans laquelle la Cour de cassation avait rappelé que « l'action tendant à la démolition d'une construction édifiée en violation d'une charge réelle [...] en vertu du cahier des charges d'un lotissement est une action réelle immobilière soumise à la prescription trentenaire », tandis que « l'action en réparation du préjudice personnel que prétend avoir subi le propriétaire d'un lot à raison de la violation du cahier des charges est une action personnelle soumise à la prescription quinquennale » (Cass. civ. 3, 6 avril 2022, n° 21-13891).

La position de la Haute juridiction est ainsi compréhensible :

  • l'action qui concerne la propriété, donc portant sur un droit réel, est soumise à une prescription de trente (30) ans ;
  • l'action portant sur la réparation d'un préjudice personnel est soumis à une prescription de cinq (5) ans.

 

 

Sur l'empiètement :

https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/droit-de-propriete-et-empietement-quelle-sanction-pour-l-ouvrage-empietant-sur-la-parcelle-voisine-sur-une-largeur-de-18-cm

Voir également sur l'état d'enclave :

https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/propriete-et-enclave-sur-la-charge-de-la-preuve-de-l-interdiction-administrative-a-l-origine-de-l-etat-d-enclave
 


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