Paris 1er

CONSTRUCTION – Méconnaissance du cahier des charges d’un lotissement : quel délai pour agir ?


Cass.civ.3, 6 avril 2022, n° 21-13.891

 

 

Cette affaire pose la question de savoir si une action en démolition introduite par un coloti contre un autre coloti, fondée sur la violation du cahier des charges du lotissement devait être qualifiée d’action réelle ou personnelle.

Cette distinction entre actions réelle et personne a un intérêt particulier depuis la réforme de la prescription en matière civile apportée par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, puisque les nouveaux articles 2224 et 2227 opèrent une distinction de la durée des prescriptions applicables selon la nature de l’action.

Rappelons que selon l’article 2227 du code civil, les actions réelles immobilières se prescrivent pas trente (30) ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer.

L’article 2224 du code civil soumet quant à lui les actions personnelles ou mobilières à une prescription de cinq (5) ans, dont le délai débute également à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d’agir.

 

 

  • Sur l’application du délai de prescription de trente (30) ans aux actions en démolition

 

 

Les juridictions semblaient divisées sur la prescription applicable à l’action en démolition d’un ouvrage.

Certaines juridictions du fond estimaient que l’action en démolition devait être soumise à la prescription de trente (30) ans (CA Aix-en-Provence 1er juin 2017, req. n° 15/15548 – CA Montpellier 6 septembre 2018, req. n° 15/07173) tandis que d’autres appliquaient la prescription quinquennale (CA Versailles 12 mars 2019, req. n° 17/06066 – CA Pau 20 décembre 2017, req. n° 15/04144).

Aux termes de cet arrêt de cassation rendu le 6 avril dernier, la Cour de cassation retient que l’action en démolition est soumise à la prescription trentenaire :

« L’action tendant à obtenir la démolition d’une construction édifiée en violation d’une charge réelle grevant un lot au profit des autres lots en vertu d’une stipulation du cahier des charges d’un lotissement est une action réelle immobilière soumise à la prescription trentenaire ».

 

 

  • Précision concernant le domaine d’application de la prescription quinquennale

 

 

Cette affaire permet à la Cour de cassation d’apporter des illustrations sur le domaine d’application de la prescription quinquennale laquelle concerne notamment l’action en réparation du préjudice que prétend avoir subi le propriétaire d’un lot en raison de la violation des stipulations d’un cahier des charges d’un lotissement.

La cour d’appel de Paris avait à bon droit déclaré irrecevable l’action en indemnisation du préjudice personnellement subi par les requérants du fait de la violation des stipulations du cahier des charges du lotissement, puisque celle-ci avait été introduite plus de cinq (5) ans après l’achèvement des constructions litigieuses.

L’arrêt de la cour d’appel est sur ce point validée par la Cour de cassation.

 

 

Sur le non respect du cahier des charges d'un lotissement voir également :

https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/construction-proportionnalite-de-la-sanction-liee-au-non-respect-du-cahier-des-charges-d-un-lotissement-et-examen-de-l-immixtion-fautive-d-un-maitre-d-ouvrage

Sur les délais de prescription, beaucoup de décisions à citer malheureusement,... voir notamment :

https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/vente-immobiliere-point-de-depart-de-la-prescription-et-distinction-entre-effets-immediat-et-retroactif-de-la-loi-nouvelle

Sur l'interruption de la prescription pour l'AFUL :

https://www.mury-avocats.fr/blog/articles/construction-capacite-a-agir-en-justice-de-l-aful-et-interruption-de-la-prescription-a-l-egard-des-constructeurs

 

 

 

 

 

 


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